DOSSIER RMC SPORT. Crise des droits TV: pourquoi au moins un tiers des sections féminines sont à vendrePlombés par la crise des droits TV, plus d'un tiers des clubs d'Arkema Première Ligue sont désormais à vendre, selon nos informations. Des investisseurs américains et anglais ont déjà manifesté leur intérêt.C'est un effet domino qui ne fait pas beaucoup de bruit (malheureusement), mais qui pourrait plonger nombre de sections féminins de l'élite française dans une période d'incertitudes profondes. Depuis de nombreux mois, la crise des droits TV vécue par le football français cristallise les tensions et a mis les clubs de Ligue 1 dans des situations financières complexes.
"Cette situation très difficile fait poser un nombre de questions aux clubs masculins qui ont une section féminine et se disent qu’il faut soit se séparer ou supprimer l’équipe féminine", explique Jean-Michel Aulas, président de la Ligue Féminine de Football Professionnel (LFFP). Conséquence directe donc sur leurs sections féminines qui évoluent en Arkema Première Ligue: d’après nos informations, plus d’un tiers des clubs du championnat de France sont désormais à vendre.
Le Havre et Reims veulent se séparer de leurs féminines... Montpellier y songeCommençons par Le Havre, dont le président Jean-Michel Roussier ne sait pas encore s'il arrivera à boucler sa saison sereinement sur le plan financier. Ajoutez à ce contexte, une situation sportive de survie en Ligue 1 qui se décidera certainement très tardivement dans la saison. Après un été où le mot d'ordre était "pas de budget" pour la mercato de la section féminine, cette fois une étape supplémentaire a été franchie. D’après nos informations, les féminines sont à vendre (montées dans l'élite depuis la saison 2022-2023). Des discussions ont même été entamées avec de potentiels repreneurs. La section féminine havraise, c’est un budget de fonctionnement d’environ 2 millions d’euros (dont 600 000 euros de dotation FFF, UEFA etc).
Cas de figure semblable à Reims. Même si le budget a été en constante augmentation ces dernières saisons, malgré le peu d’entrain de la part de la direction, la réussite des féminines en Champagne (actuellement 11e et relégables) devait beaucoup à Amandine Miquel, l'entraineure historique qui faisait des miracles. Vu les difficultés économiques actuelles de Reims, le "SDR" au féminin est à vendre. Enfin, il y a Montpellier. En recherche de partenaires, Laurent Nicollin tente de sauver son club. Au MHSC, la section féminine a depuis de nombreuses années une place à part. Mais face aux réalités économiques actuelles et à la menace d’une rétrogradation en Ligue 2, le président songerait à se séparer d’une partie de sa section. D’après nos informations, outre ces quatre sections (en comptant Dijon citée après), d’autres sont également dans ce processus.
À Dijon, c'est officielC'est de notoriété publique depuis plusieurs semaines désormais. la section féminine de Dijon est à vendre. Le président souhaite s'en séparer dans une logique globale de réduction des coûts pour le DFCO. Pour le coup, cette décision n'est pas liée à la crise des droits TV, mais plutôt à un désengagement du club pour sa section féminine. À Dijon, la section féminine représente environ 2,7 millions d'euros de budget. Les joueuses de Sébastien Joseph sont encore dans la course aux play-offs, elles jouent tous leurs matchs à domicile au stade Gaston Gérard. Mais malgré cette installation en D1 et des résultats en progression, cela n'a pas suffi à convaincre le président Pierre-Henri Deballon face aux difficultés économiques du club.
Une anecdote du fonctionnement interne prouve le manque d'investissement humain pour le développement de la section féminine dijonnaise: il n'y a pas de service commercial dédié aux féminines. Dans le book de présentation du club, elles seraient placées en toute fin. Et donc pas vendues comme un axe de partenariat innovant. Elles sont même parfois présentées comme un supplément en cas de signature d'un accord avec une entreprise pour l'équipe élite masculine qui évolue en National.
Le club cherche toujours un repreneur. Pour l'instant, aucune offre concrète n'est sur la table, d’après nos informations. "A Dijon, comme dans beaucoup d'autres clubs en France, on n'a pas su réellement surfer sur l'élan de la Coupe du monde 2019. Les sections féminines sont souvent des faire-valoir. Et dès qu'il y a un contexte économique difficile pour un club, la première chose à laquelle pensent les dirigeants pour faire des économies, c'est la section féminine", nous confie un entraîneur passé par la D1 désormais en poste à l'étranger. La Ligue féminine de football professionnel, via son président Jean-Michel Aulas, s'est mise en marche pour trouver un potentiel repreneur. Mais pas seulement pour Dijon.
Les investisseurs arrivent en France
Dans ce contexte, la LFFP a travaillé ces derniers mois pour fiabiliser un dispositif de vente des sections en collaboration avec le ministère des Sports, à l’image de ce qui a été fait pour le rachat de l’Olympique lyonnais. "La LFFP a mis au point un dispositif très ambitieux tant sur le plan de l’organisation des structures autant que sur le plan de la définition d’un nouveau modèle en termes d’exploitation en allant chercher de nouveaux sponsors, et trouver les investisseurs susceptibles de s’intéresser au football féminin capable prendre le relais de clubs masculins qui seraient en difficulté au travers e la crise actuelle", détaille Jean-Michel Aulas. Résultat: 6 investisseurs américains et anglais sont entrés ces derniers mois en discussion avec la LFFP et les clubs concernés d’Arkema Première Ligue. "Ce sont des fonds d’investissement qui se sont créés spécialement pour le football féminin. Principalement, ce sont des investisseurs américains ou anglais. En général, ils ont une expérience dans la NWSL par de l’actionnariat. Ils croient dans la croissance du football féminin. Avant la fin de l’exercice 2024-2025, je pense que l’on sera à même d’annoncer plusieurs opérations qui vont amener des investisseurs solides pour le football féminin français", poursuit le président de la LFFP. Deux investisseurs français sont également sur les rangs et s’intéressent à des sections féminines.
Un processus de rachat cadré
Pour faire leur entrée dans le championnat français, ces investisseurs devront respecter une sorte de cahier de charges pour exister en D1 féminine à travers notamment la "Licence Club" mise en place par la Fédération (structures, centre d'entraînement, ressources humaines et économiques, stade etc), mais aussi respecter un processus juridique précis encadré par la préfecture locale compétente. "La situation exacte des clubs est vérifiée par la DNCG et la DTN au moment où le deal peut se faire ou de manière anticipée", précise Jean-Michel Aulas. L’aspect juridique est également pris en compte, comme la création d’une société anonyme ou SASP à la place de l’association (structure au sein laquelle certaines sections féminines font partie actuellement au sein des clubs).
Difficile pour l’instant de se prononcer sur un montant de valorisation. Pour rappel, l’Olympique lyonnais avait été racheté par Michelle Kang à hauteur de 50 millions d’euros. Mais on parle d’un club octuple champion d’Europe. L’OL de Jean-Michel Aulas avait racheté Seattle en 2019 pour un peu plus de 4 millions d’euros. Pour l’ensemble de ces sections féminines, on pourrait estimer ces investissements à plusieurs dizaines de millions d’euros. Pour entrer dans une nouvelle ère?
RMC
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