CDM féminine – Bilan (personnel) définitif !

 La 8e édition de la coupe du monde féminine de football est terminée. Voici l’heure des bilans. Pour ceux, officiels et chiffrés, je vous renvoie au site de la FIFA, à la page Wikipedia ou à divers sites spécialisés, inutiles de faire des copier-coller ici. À la place, voici plutôt ce que je retiens personnellement de cette compétition après avoir visionné ses 52 rencontres, dont six directement au stade (Allianz Riviera de Nice, rebaptisé pour l’occasion Stade de Nice). Voici donc mon bilan…

 

L’ORGANISATION

 Côté ratés ou aurait pu mieux faire :

– multiplaces achetées pour un même match dès le premier jour, mais sièges éloignés les uns des autres.

– contrairement aux annonces de la FIFA, impossibilité sur son site de mettre à la revente une place de match à guichets fermés.

– monopole exclusif Coca-Cola (et Visa) dans les enceintes de stade, favorisant par force la malbouffe à l’américaine dans un pays champion de la gastronomie générale. Il eût été bien plus intelligent et agréable que chaque ville-hôte puisse organiser au sein de chaque stade des stands de restauration à partir de produits locaux. Chaque région de France a ses spécialités. À Nice, par ex., pourquoi ne pas avoir offert au public, qu’il soit local ou étranger, la possibilité de déguster pissaladière, pan-bagnat, socca, tourte de blettes, petits farcis, etc. ? Et idem à Valenciennes, Lyon, Paris, Rennes, Reims, Montpellier, Le Havre, Grenoble…
Ce monopole touchait également les bouteilles d’eau, avec obligation d’enlever les étiquettes de votre bouteille à l’entrée du stade (et sans son bouchon, bien sûr).

– si la mise à disponibilité des drapeaux « Coupe du Monde » derrière chaque siège ou presque était une initiative sympathique, mettre ceux des pays en lice ce jour-là aurait aussi pu être sympathique (et c’est la personne la moins nationaliste qui soit qui vous le dit…).

– des matchs en plein après-midi (et je compte ici aussi ceux de 17h) sous la canicule. Inhumain ! Mais 52 matchs à caser en un mois et en plein été… difficile sans doute de faire autrement (excepté pour les deux derniers, qui auraient facilement pu être décalés à 19h30 ou 20h).

Côté réussi :

– les bénévoles.

– le reste, c’est-à-dire ce qui est resté invisible et qui a donc fonctionné sans même que l’on s’en aperçoive.

IMPACT MÉDIATIQUE

 Ici, on ne peut que se réjouir de ce qui a été fait, pas seulement dans le cadre hexagonal, mais dans le monde entier. Tous les pays concernés ou presque ont battu des records d’audience aux matchs télévisés de leur sélection. En France, on a dépassé les 11 millions de téléspectateurs pour les Bleues, un chiffre à comparer avec celui, alors qualifié d’historique, des 4,5 millions pour la rencontre France-Usa en demi-finale du mondial 2011. Cette gigantesque progression s’est avérée identique en Angleterre, en Allemagne, en Espagne, en Italie, au Brésil, etc.
On peut cependant continuer à regretter que le service public audiovisuel national n’ait pas jugé bon de se positionner pour retransmettre les matchs, laissant l’exclusivité à des chaînes privées, le groupe TF1/TMC et C+. Si le premier offrait les diffusions sur la TNT, donc gratuites, il n’a pas couvert tous les matchs, que seul Canal Plus, chaîne payante, a retransmis dans leur totalité.

En dehors de la télévision, les radios se sont massivement mobilisées, qu’elles relèvent du public – de France-Info à France-Inter, en passant par France-Culture – ou du privé…
La presse écrite, papier ou en ligne, a également relayé l’événement de manière importante, qu’elle soit généraliste et nationale (Le Monde, Libération, etc.) ou régionale (avec des différences selon les cas, cependant), ou spécialisée (L’Équipe, France-Football, So-Foot…). Les sites dédiés au football féminin ont fait le job, de manière plus ou moins pertinente, certains privilégiant la seule information (éventuellement très complète) au détriment d’analyses personnelles éditoriales, d’autres mettant en exergue des à-côtés de la compétition.
Je salue et remercie au passage l’équipe dirigeante de MassaliaLive qui m’a proposé de suivre pour eux le tournoi avec une vraie carte blanche. J’ajoute que ce fut un immense plaisir jusqu’à cet ultime article sur le sujet !

Sur le contenu de la couverture médiatique, on a bien sûr trouvé un peu de tout en qualité, aussi bien dans la forme que sur le fond. Beaucoup d’articles furent consacrés à une approche sociologique et politique de la discipline, notamment dans la presse non spécialisée et qui, par ce biais, cachait parfois ses lacunes et méconnaissances du football féminin : statut des footballeuses, revendications pour une pleine égalité femmes-hommes, féminisme, etc. Les sujets tournant autour de l’équipe des États-Unis en furent l’exemple le plus criant, sa capitaine Megan Rapinoe ne voyant guère souvent son jeu de footballeuse analysé, au profit d’une image de rebelle anti-Trump tournant en boucle.

 

ASSISTANCE VIDÉO À L’ARBITRAGE (VAR)

On pourra en débattre encore des années, l’AVA est là, et elle ne sera pas retirée… J’ai toujours été personnellement en faveur de son introduction, car la glorieuse incertitude du sport ne doit pas résider sur des erreurs et des injustices, mais uniquement sur des performances sportives.

Il faut le dire et le répéter : l’AVA n’est qu’une technique, neutre par définition. Les problèmes pouvant surgir – et ils ont été assez nombreux – ne résultent que d’interprétations erronées (que l’on veut croire toujours involontaires…) des êtres humains chargées de visionner les images et d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

Ici, le problème n’est pas tant que telle ou telle loi du jeu est bien ou mal faite (on pourra là aussi discuter des heures durant de celle concernant les mains dans la surface), que celui d’une même interprétation – et par conséquent d’une même application – dans tous les cas semblables. Exemple notoire : la capitaine japonaise Saki Kumagai sanctionnée d’un pénalty qui élimine son équipe à la dernière minute en 8e de finale face aux Pays-Bas pour un bras involontaire, légèrement écarté et qui dévie un ballon tiré à un mètre, et de l’autre côté la joueuse états-unienne Kelley O’Hara non sanctionnée pour exactement la même faute contre la France et qui, en cas contraire aurait offert une balle d’égalisation aux Bleues… Soit il y a faute et pénalty, soit il n’y a pas faute et pas pénalty. Dans les deux cas. Le fait de dire comme Bixente Lizarazu : « Dans le premier cas, le ballon allait droit au but, pas dans le second » ne tient absolument pas. Car dans le deuxième, c’est bien un centre devant le but qu’envoie Majri. Or, rien n’indique que le ballon dévié par Kumagai eût été cadré, comme rien n’indique que le centre de Majri n’eût pas été détourné dans les filets par une joueuse française bien placée…

Donc, il faut harmoniser les décisions.
L’AVA est intervenue massivement lors du premier tour, moins par la suite. Elle a déclenché de grandes polémiques concernant les pénaltys (un nombre record a été sifflé dans cette édition) en en faisant retirer plusieurs qui avaient été arrêtés par des gardiennes, en application d’une nouvelle règle mise en application au 1er juin seulement, soit… six jours avant le début de la compétition ! D’autres pénaltys, qualifiés au mieux de contestables, au pire d’imaginaires furent sifflés après visionnage vidéo par l’arbitre central, notamment celui qui donne la victoire et la qualification aux États-Unis en 8e de finale contre l’Espagne (deuxième pénalty en leur faveur du match, le premier étant légitime)…

 Après consultation de l’AVA, des buts furent refusés ou validés de façon tout aussi étrange les uns que les autres, pour des hors-jeu inexistants ou se révélant de 10 cm après plusieurs visionnages (ce qui tourne au ridicule), ou des mains soupçonnées, mais non franchement apparentes…
Bref, ce n’est pas l’AVA qu’il faut remettre en question, mais :

1) Éclaircir et simplifier les lois du jeu au lieu de les compliquer…

2) Harmoniser les lectures et interprétations des images, et les décisions qui en découlent…

3) Former bien mieux le corps arbitral à ce nouvel outil.

LE JEU

Une qualité mi-figue, mi-raisin, avec circonstances atténuantes.

 Le rapport d’analyse technique et tactique que sortira comme d’habitude la FIFA, établi par ses expert/es, en dira bien plus – et bien mieux – que tout ce que je pourrais dire ici. Je me contenterai donc de quelques remarques.

– Le niveau global a été quelque peu décevant, mais il faut relativiser. Sur les 52 matchs disputés, combien ont pu être qualifiés de vraiment bons, non pas au niveau de leur suspense, mais bel et bien en vertu de la qualité du jeu et d’elle seule ?

J’en ai recensé – et je n’ignore évidemment pas la dimension subjective du jugement – moins de 30% comme ayant été notés par mes soins avec une note égale ou supérieure à 7/10 : quatre avec 8/10, quatorze avec 7/10, mais un seul des quarts de finale,  aucune des demi-finales, ni la finale n’en font partie (voir le détail plus bas), soit seulement deux vrais bons matchs(dont celui de classement) sur les huit derniers.

Alors ce n’est pas catastrophique non plus, car peu sont tombés sous la moyenne (trois seulement entre 4 et 4,5/10). La majorité se retrouve autour d’un 6/10, soit « pas mal ». Ça aurait pu être mieux (surtout sur les derniers matchs), mais aussi bien pire. Il faut aussi prendre en considération les conditions de jeu difficiles en raison de la canicule envahissant le pays en cours de tournoi, et la fatigue accumulée.

 Confirmation une fois de plus que possession de balle ne signifie pas victoire assurée. Les équipes qui sont arrivées au bout pratiquent toutes un jeu soit très direct et vertical (Suède), soit un mélange de possession tant que le score est de parité, puis direct et en contre lorsqu’il tourne (souvent assez vite) en leur faveur (États-Unis, Angleterre, Pays-Bas).

Pour la première fois, on a vu les États-Unis passer systématiquement à cinq derrière dans la dernière demi-heure (et menant au score)  lors de ses trois ultimes rencontres.

– Elles ont souvent été brocardées et présentées comme le maillon (très) faible du football féminin : les gardiennes de but ont largement brillé, que ce soit lors de la phase initiale ou des matchs couperets. On a applaudi aux exploits répétés des Van Veenendaal, Endler, Lindhal, Correa, Schneider, Bouhaddi, Barbara, Schult, Bardsley, Peng, Yamashita, etc.

– Conformément à la tradition du football féminin, on a vu très peu d’exemples de sélections jouant volontairement derrière, le jeu restant en priorité généreux.

– En dehors de la rencontre très spéciale entre l’Angleterre et le Cameroun en 8e de finale (et qui se trouve à l’examen de la FIFA qui doit juger du comportement de certaines joueuses camerounaises), on n’a pas vu d’agressions caractérisées ou de mauvais gestes volontaires d’une joueuse sur une autre. Si beaucoup de pénaltys ont été sifflés, ils doivent être mis sur le compte de l’AVA et non d’une recrudescence de violence. Dans l’immense ensemble (avec quelques exceptions cependant) les décisions arbitrales, même contestables, ont peu été contestées par les joueuses et, lorsqu’elles le furent, plutôt de façon modérée et courte…

Lors de ce tournoi, les joueuses ont également montré au monde entier que la simulation n’appartenait décidément pas aux valeurs de la discipline, même si les observateurs auront remarqué une certaine propension des joueuses des États-Unis à plonger ou à en rajouter. Espérons que ce genre de gestes reste rarissime.

 

LES MEILLEURS MATCHS

(ayant obtenu une note égale ou supérieure à 7/10) :

8/10

7,5/10

7/10

Australie-Brésil (3-2, gr. C)

Angleterre-Japon (2-0, gr. D)

Norvège-Australie (1-1, 4 tab 1, 8e)

 

Pays-Bas-Japon (2-1, 8e) France-Corée du Sud (4-0, gr. A)

Angleterre-Écosse (2-1, gr. A)

France-Norvège (2-1, gr. A)

Angleterre-Argentine (1-0, gr. D)

États-Unis-Chili (3-0, gr. F)

Espagne-Chine (0-0, gr. B)

Italie-Brésil (0-1, gr. C)

Angleterre-Norvège (3-0, 8e)

Allemagne-Suède (1-2, 1/4)

Angleterre-Suède (1-2, 3e place)

On retrouve donc 5 fois l’Angleterre (sur 7 matchs), la Norvège 3 fois, le Brésil, le Japon, la France, l’Australie et la Suède 2 fois.

 

TOP 3 DES ÉQUIPES…

 … les plus agréables à voir jouer :

  1. Japon
  2. Angleterre
  3. Italie

— … des belles surprises (équipes que je n’attendais pas à ce niveau de qualité, indépendamment du résultat) :

  1. Italie
  2. Brésil
  3. Suède

— … des déceptions (équipes que j’attendais à un meilleur niveau de qualité, indépendamment du résultat) :

  1. France
  2. Pays-Bas
  3. États-Unis

— … de la combativité :

  1. Angleterre
  2. Suède
  3. Japon

de la chance (faits de jeu, décisions arbitrales…)

  1. États-Unis
  2. France
  3. Suède

TOP 5 DES JOUEUSES…

 les révélations

  1. Giulia Gwinn (Allemagne, 20 ans)
  2. Sidney Schneider (Jamaïque, 20 ans)
  3. Lena Oberdorf (Allemagne, 17 ans)
  4. Jayde Rivière (Canada, 18 ans)
  5. Ellie Carpenter (Australie, 19 ans)

… les confirmations (fidèles à leur statut ou leur réputation)

  1.  Jill Scott (Angleterre, 32 ans)
  2. Danielle Van de Donk (Pays-Bas, 28 ans)
  3. Kosovare Asllani (Suède, 30 ans)
  4. Rose Lavelle (États-Unis, 24 ans)
  5. Hina Sugita (Japon, 22 ans)

TOPS ET FLOPS POUR CHAQUE SÉLECTION

 AFRIQUE DU SUD

Tops : Van Wyk, Kgatlana.
Flops : …

ALLEMAGNE

Tops : Gwinn, Schult, Däbritz.
Flops : Simon, Huth, Leupolz.

ANGLETERRE

Tops : Scott, White, Bronze, Walsh.
Flops : Houghton, Greenwood, Duggan, Kirby (en partie).

ARGENTINE

Tops : Correa, Banini.
Flops : Jaimes.

AUSTRALIE

Tops : Carpenter, Van Egmond.
Flops : De Vanna, Foord, Kerr (en partie).

BRÉSIL

Tops : Barbara, Cristiane, Debinha.
Flops : Monica, Tamires, Thaisa, Marta (en partie).

CAMEROUN

Tops : Nchout, Onguené.
Flops : Enganamouit.

CANADA

Tops : Buchanan, Lawrence, Riviere.
Flop : Beckie.

CHILI

Tops : Endler, Urrutia, Araya.
Flop : Galaz.

CHINE

Tops : Peng Shimeng, Li Ying.
Flops : Wang Shuang, Gu Yasha.

CORÉE DU SUD

Top : …
Flops : Ji Soyun, Cho Sohyun

ÉCOSSE

Tops : Cuthbert, Emslie.
Flops : Beattie, Corsie, Little.

ESPAGNE

Tops : Paredes, Hermoso, Luisa Garcia.
Flops : Putellas, Sampedro, Nahikari Garcia.

ÉTATS-UNIS

Tops : Lavelle, Mewis, Rapinoe.
Flops : Heath.

FRANCE

Tops : Diani, Henry, Bouhaddi.
Flops : Le Sommer, Majri, Torrent, M’Bock (en partie), Renard (en partie), Thiney, Bussaglia.

ITALIE

Tops : Linari, Girelli, Galli, Gama.
Flops : Bonansea (en partie).

JAMAÏQUE

Tops : Schneider, Shaw (en partie).
Flops : Plummer, Brown.

JAPON

Tops : Sugita, Iwabuchi, Yamashita, Kumagai, Ichise.
Flops : Yokoyama, Nakajima.

NIGERIA

Top : Ordega.
Flops : Oshoala (en partie), Oparanozie.

NORVÈGE

Tops : Reiten, Mjelde, Hansen (en partie), Herlovsen.
Flops : …

NOUVELLE-ZÉLANDE

Top : Nayler.
Flops : Gregorius, Riley.

PAYS-BAS

Tops : Van Veenendaal, Van de Donk, Spitse, Groenen.
Flops : Van de Sanden, Martens (en partie).

SUÈDE

Tops : Asllani, Jakobsson, Lindhal, Fischer, Glas, Eriksson.
Flops : Hurtig.

THAÏLANDE

Tops : Sung Ngoen, Nidhamrong.
Flops : la défense…

Ma sélection du mondial

 Van Veenendaal

 Bronze        Fischer      Linari    Eriksson

Scott       Van de Donk        Lavelle

     Jakobsson              White          Rapinoe

 Remplaçantes : Endler, Lindahl (gardiennes), Gwinn, Glas, Kumagai, Paredes (défenseures), Asllani, Sugita, Henry (milieux), Diani, Hermoso, Iwabuchi (attaquantes).

 

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A propos de Philippe Serve


Supporter de l'OM depuis sa finale victorieuse en Coupe de France en 1969. Tombé amoureux du foot féminin, un peu d'abord en 2007 et 2008, définitivement en 2011. Ai suivi pendant 4 ans au plus près l'OM féminin via mon site Olympiennes et Marseillaises. Assume complètement d'être supporter à la fois de l'OM ET de l'OGCN, club de ma ville natale ! Informe au quotidien sur tout le foot féminin, mais aussi sur l'actualité la plus diverse via mon compte perso Twitter @Olympiennes
Article lu 1364 fois, écrit le par Philippe Serve Cet article a été posté dans Compte-rendu et taggé , , , , . Sauvegarder le lien.

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