Information
Comment le Vel' est devenu une forteresse imprenable
Depuis qu'ils ont soigné leur syndrome Vélodrome, en fin d'année 2024, les Olympiens sont devenus irrésistibles sur leurs terres. Un stade où les visiteurs, hormis les braqueurs de Lens, se font rosser un week-end sur deux.
Spectaculaire guérison. Inerte sur son brancard, les signes vitaux au plus bas, l’OM était malade. Copieusement. Traumatisé, même, par cette triple agression, d’une violence inouïe, infligée par le PSG (0-3), Auxerre (1-3) et ces 65 000 supporters écœurés, qui ont crevé les tympans de leurs préférés. Au cœur de l’automne 2024, Roberto De Zerbi et sa bande allaient succomber au syndrome Vélodrome. Un crève-cœur pour le technicien italien dont le souhait le plus cher, en signant au pied de la Bonne Mère, était de triompher dans cette royale atmosphère.
À domicile, Leo Balerdi et sa bande venaient de toucher le fond. Mais, plutôt que creuser au-delà des limites propres aux clubs dits "normaux", l’OM a soudain sorti la tête de l’eau. Mieux, aujourd’hui, il marche dessus, lorsque celle-ci coule le long du boulevard Michelet. Depuis le tour du déshonneur du 8 novembre, "Roby" réussit son pari. Que le Vel' devienne le théâtre d’une émouvante symbiose, entre ses protégés et ces fadas qui s’y cassent la voix.
"Même des cadres redoutaient le Vélodrome"
Après avoir hanté les Olympiens, le stade Vélodrome effraie enfin les bonnes personnes. Ceux qui s’y rendent une fois par saison. Jadis avec l’espoir d’y décrocher au moins un point, aujourd’hui avec la crainte de rentrer les valises pleines. Seuls les braqueurs Sang et Or (0-1), sauvés par Mathew Ryan, auteur du match de sa vie, ont réussi à mettre un petit coup de canif à une copie presque parfaite. Sur les 17 derniers matches disputés chez eux, les Marseillais ont signé 13 succès, 3 nuls et, donc, 1 revers. Ils y ont surtout ajouté la manière, avec une ribambelle de buts (50 inscrits, soit 3 en moyenne), signant le meilleur bilan sur cette période, au sein des cinq grands championnats européens. À l’ombre de ces belles et prolifiques soirées, la troupe de Roberto De Zerbi a même mis à mal une idée reçue, selon laquelle sa philosophie serait stérile face aux formations frileuses.
Si l’OM n’aperçoit qu’au loin le record de succès consécutifs en Ligue 1, à la maison (7, série en cours, contre 14*), tous ont en mémoire ces jours où tout a changé. Sur les hauteurs de La Commanderie, l’on évoque encore ce stage commando comme un déclic. Le remède. Un avant et après Mallemort (26-28 novembre). Une idée originale signée De Zerbi, impatient d’entrer dans la psyché de ses garçonnets. Certains, trop fiers, ont d’abord fait mine d’être insensibles à la pression du Vel'… jusqu’à l’irruption de Valentin Rongier. Le doyen de l’effectif a brisé la glace, en confessant la peur qui a escorté ses débuts.
"On a découvert qu’il y avait beaucoup de joueurs, même des cadres, qui redoutaient le Vélodrome. Ils craignaient de rater un but, de louper une passe ou un tacle. La peur d’être sifflé. Cette ferveur devait être un élan, elle s’était transformée en frein", raconte-t-on au club. Pour enfoncer le clou, De Zerbi a diffusé une vidéo sur Marseille, ces personnes qui font la ville et le club, ces supporters, mûres ou jeunes, riches ou pauvres, mais tous dévoués à l’OM.
Séquence émotion, loin d’être anecdotique. "Les joueurs ont compris que le public n’était pas seulement exigeant, mais aussi reconnaissant quand on le respecte. Il salue l’effort d’un attaquant qui sprinte sur 35 mètres pour récupérer un ballon, le dépassement de fonction d’un défenseur. Au Vel', on n’est pas là pour applaudir seulement les buts et petits ponts, ajoute-t-on au centre RLD, où l’on a mis l’accent sur l’investissement pour charmer le public, et dédramatiser l’échec de gestes décisifs, in fine plus rares au cours d’une rencontre. Grâce à cet état d’esprit, on se retrouve vraiment à jouer à douze contre onze."
Dans les bureaux, des enseignements ont été tirés. Ils ont esquissé, au moins une partie, du portrait-robot des futures recrues. Aubameyang, Emerson, Aguerd ou Pavard, avant de débarquer, en avaient vu d’autres. Davantage que des bleus, certes talentueux, comme Wahi, Brassier et Koné. Alors, quand le ton est donné dès l’atterrissage sur le sol provençal… "L’accueil à l’aéroport, c’est un avant-goût du stade Vélodrome, note l’entourage d’un joueur. Certes il y a une énorme attente, mais c’est aussi beaucoup d’amour. De la confiance pour les premiers pas au Vel', pour aborder cet événement sans trembler." Et défendre la forteresse marseillaise.
La Provence