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OM : Weah au PSG, retour sur les années capitales du néo-Marseillais
Né aux États-Unis, où il a embrassé le même sport que son père, le néo-Marseillais, qui n'était pas forcément destiné au professionnalisme, a appris son métier dès son arrivée sur le Vieux continent, au centre de formation du... PSG.
Comme son père, il est tombé dans les filets marseillais. Comme son père, il a d'abord défendu le PSG. Pour lui, ses premières années. Pour Georges, ses meilleures. Dans la capitale, la graine a été plantée, copieusement arrosée. L'athlète y est devenu footballeur. L'ado, bientôt, un joueur sur lequel De Zerbi allait flasher. Un fidèle, silencieux et dévoué soldat. Un couteau suisse prêt à rendre de fiers services. Si ce n'est mieux, à Madrid. Son acte de naissance en Provence.
Peut-être, l'autre Weah y briguera un surnom familier. Mais avant de devenir "Mister Timothy", au pied de la Bonne Mère, il était "Tim" dans une autre vie. De l'autre côté de l'Atlantique, et à l'ombre de la tour Eiffel. Là, où tout a commencé. Là, où, malgré l'héritage paternel, il n'était pas destiné. New-Yorkais pur jus, cadet d'une famille de trois enfants, Timothy, sans surprise, a imité les grands. Son père et son grand frère, Junior, jouaient au foot ? Il fera pareil dans une petite équipe du Queens, où l'on appelle soccer cet étrange sport. Le ballon roulera en Floride, de nouveau dans la "Big Apple", au fil de ses déménagements.
"Timothy est totalement différent de Georges"
Déjà, sa mère, Clar Duncan veille au grain. "C'est mon idole", glissera avec admiration le néo-Marseillais, à propos de son professeur particulier. Davantage que Georges, plutôt taciturne quand il ne mène pas campagne au Libéria, l'ancienne athlète jamaïcaine mène "Tim" aux quatre coins de l'état, débriefe ses matches et lui tape parfois sur les doigts. Clar et son mari ont convenu d'une chose. Quand Timothy poussera les portes d'une académie, cela devra se faire loin des traces du Ballon d'Or 1995. Question de paix et sérénité. En principe, pour apprendre le métier, pas de Monaco, Paris, Marseille ou Milan. Vraiment ?
À ses 13 printemps, Chelsea était sur les rangs. Après quelques essais, Toulouse également. Malgré les réticences initiales, à la faveur d'un concours de circonstances, le... PSG va rafler la mise. Un ami de la famille, installé en région parisienne, lui ouvre les portes du Camp des Loges. Son passeport français, acquis à sa naissance via son père, facilite les démarches administratives. En quatre ans, jusqu'à sa majorité, son départ pour Lille, Timothy deviendra l'autre Weah.
"J'étais amoureux de son papa, et je le suis tombé aussi vite de lui. Georges avait sa personnalité, un gros caractère et un immense charisme. Timothy est totalement différent, bien plus discret, juge Luis Fernandez, ancien entraîneur (1994-96) et directeur de la formation (2017-18) au PSG. Il avait une mentalité remarquable pour un garçon de son âge. Il était à l'écoute, respectueux, avec une hygiène de vie irréprochable. Pas un mot de travers, ni de mauvaises humeurs quand on le mettait sur le banc. Il savait déjà que tout passait par le travail."
"S'il faut le recadrer, n'hésitez surtout pas !"
Loin de sa famille, éparpillée entre les États-Unis et l'Afrique, "Tim" ne connaît pas le spleen. Dans les couloirs du centre de formation, où il partage sa chambre avec Éric-Junior Dina-Ebimbe, le très Américain Weah impose ses codes à la génération 2000 (Diaby, Zagre, Nsoki...). "Il respirait la joie de vivre, c'était un moteur du vestiaire malgré son français très laborieux. Il nous faisait rire avec son accent à couper au couteau, se souvient son ex-éducateur pendant trois saisons, des U19 au National 2, François Rodrigues. Il adore chanter, la musique le suivait partout. Il est très attaché à sa culture afro-américaine."
Sur les pelouses, Timothy Weah ne calcule pas. Pas le temps de gazouiller ou se déhancher, il fonce tout droit, se repose sur son don inné. "Il avait de qualités physiques exceptionnelles, que ce soit sa pointe de vitesse ou sa capacité à répéter les efforts. Sur le plan tactique et technique, par contre, on devait combler ses lacunes", décrypte l'éducateur aujourd'hui en poste en Arabie saoudite.
Malgré ses jambes de feu, son ancien protégé ne brûlait pas l'asphalte menant à la cour des très grands. Dans cet univers ultra-concurrentiel, d'autres étaient promis à une carrière professionnelle. "Il a dû beaucoup travailler. Il était focalisé sur les tâches offensives, mais une telle attitude est incompatible avec l'étage du dessus. On lui a appris à courber l'échine, s'occuper de son latéral, harceler les centraux. Toute la panoplie défensive d'un offensif. Comme il est intelligent et très demandeur, sa progression a été fulgurante", applaudit Rodrigues, à qui Clar Duncan a donné carte blanche.
Fidèle au poste, dès que possible, la future première dame du Libéria était l'interlocutrice privilégiée du PSG. "Très protectrice, bienveillante, mais jamais envahissante", elle se présentait souvent en fin de séance. Après s'être assurée que son héritier s'était bien comporté, madame Weah ponctuait les échanges d'une consigne devenue légendaire : "S'il faut le recadrer, n'hésitez surtout pas !". Rares ont été les sermons. Les tentations n'ont pas manqué, mais Timothy n'a jamais dévié du cap, se relevant et dribblant les embûches sur son chemin. "Il a connu des moments difficiles, de doute aussi. On a été très exigeant avec lui. Parfois il était remplaçant, mais il aimait tellement le jeu... Tout était très fluide, rien de négatif. Dès qu'on lui expliquait notre démarche, c'était reparti. On retrouvait dès le lendemain le Timothy super enthousiaste, savoure le formateur également passé par Caen et Le Havre. Au PSG, il y avait une concurrence féroce. Il a fallu le mettre sur le banc, le sortir du groupe, le faire redescendre de catégorie. C'était dur pour quelqu'un d'aussi ambitieux, mais cette frustration a fait partie de son apprentissage."
Ce retard, à l'époque, sur ses concurrents en pointe (Jean-Kevin Augustin, Odsonne Édouard, Wilfried Kanga...) lui a offert, in fine, sa plus belle richesse. Contraint de s'exiler, il a pris goût aux ailes. À gauche, à droite, dans tous les systèmes. Une précieuse polyvalence, sa marque de fabrique.