Zéro à z’Eyraud

En habitués que vous êtes de la langue de bois du footballeur, vous connaissez le célèbre : « Non, mais l’important, c’est les trois points » ou le très usité « Peu importe ma performance individuelle, tant que le collectif tourne ». Et il en est un utilisé particulièrement lorsque les résultats ne sont pas vraiment au rendez-vous, malheureusement employé par notre président cette saison : « C’est à la fin du bal qu’on paie les musiciens ».

Expression qui sous-entend qu’il ne faut en aucun cas juger ces messieurs trop hâtivement et attendre la fin pour éventuellement apporter un début de semblant de ce qui pourrait être une presque critique.

Voilà ! La fin du bal est arrivée il y a maintenant une semaine, la musique a cessé – enfin – de résonner à nos oreilles en sang et le chef de la chorale a été remercié. Si l’on en croit la presse spécialisée, il a été payé et même très bien payé. Mais qu’en est-il du chef d’orchestre ? Qu’en est-il de celui qui, il y a maintenant deux ans et demi, nous promettait opéras et symphonies ?

Accueilli en quasi-héros et sauveur, notre président délégué, avait entamé une opération séduction, fort réussie il faut l’avouer, lors de son arrivée. A coup de « Dire c’est fait rire et faire c’est faire taire » ou de « Nous remettrons l’OM à la place qui est la sienne » ou enfin par le nom donné au projet : OM Champions Project !

Bien entendu le bilan de ces deux années pourra être remis en question à la fin de la troisième qui va commencer. Il s’agit ici de faire une photographie à l’instant T et non pas de préjuger de ce qui va se passer. D’une, parce que je n’ai pas de boule de cristal (ni même en titane comme notre désormais célèbre illustrateur @Baccalhao) et de deux parce que l’adage qui dit qu’en football tout va très vite est une vérité. Il suffit de regarder le LOSC de l’an passé et celui de cette saison pour finir de s’en convaincre.

Analyse… les bases

Pour nous supporteurs, même si on sait qu’en football, il y a autant de spécialistes que de potentiels entraîneurs, il est malgré tout objectivement difficile de juger le sportif. Nous ne détenons pas toutes les clefs pour nous permettre d’énoncer des vérités. Le club ne nous laisse voir que ce qu’il a bien envie de nous laisser voir. Les indiscrétions qui en sortent sont souvent maitrisées pour ne pas dire carrément téléguidées et de fait, faire une analyse objective sur ce qui a fonctionné et n’a pas fonctionné n’est pas vraiment dans nos compétences.

En revanche, nous pouvons analyser la partie émergée de l’iceberg, à savoir la communication, le jeu proposé, les actions concrètes comme les transferts ou l’extra-sportif et les résultats des différentes équipes.

Une communication… déroutante

Une des raisons de l’incompréhension entre la direction et les supporteurs est sans aucun doute la communication assez déroutante, pour ne pas dire lunaire par moment. Lors de la première saison, les résultats étant satisfaisants, nous n’avions aveuglément pas remarqué cet aspect là des choses, mais avec le recul et passés les émois d’une relation naissante, force est de constater que dès le départ il y avait des choses qui n’allaient pas dans la communication.

Par exemple, lorsque le président annonce la somme de 200 millions d’euros qui va être l’enveloppe globale sur trois ans, on peut se demander pourquoi communiquer sur le montant. Et même si ce montant est faux, ce qui semble être le cas, pourquoi en parler lorsqu’on sait qu’en matière de mercato il ne faut surtout pas parler d’argent tant son odeur attire les requins de toutes eaux, même nauséabondes.

De la même façon, lorsqu’il a communiqué sur les agents troubles qui allaient être interdits d’entrée à la commanderie – ce qui en soit est une bonne chose -, pourquoi là aussi en parler et juste ne pas mettre les personnes concernées devant le fait accompli ?

Dernièrement nous avons eu droit à : « Raymond Domenech, on parle de lui à propos de Knysna mais c’est aussi un entraîneur qui est allé en finale de Coupe du Monde, un entraîneur qui nous a fait rêver » peu de temps après le désormais tristement célèbre : « Pourquoi Fifa propose aujourd’hui qu’un but mis en dehors de la surface, rapporte deux points ? Pourquoi cela ne pourrait pas être le cas dans la vie réelle ? ».

Mais dans la vie réelle, y est-il justement ?

Vis-à-vis des supporteurs les choses sont là aussi assez étranges. Le président ne cesse de clamer leur côté indispensable : « Nous avons vécu ensemble une saison difficile, autant dans les compétitions nationales qu’en coupe d’Europe. Le soutien que vous apportez aux joueurs est sans équivalent en France. Nous aurons toujours besoin de vous, dans les bons, mais surtout dans les mauvais moments. Repartons ensemble pour le bien de notre club, pour guider l’équipe dans sa reconquête (…). Les supporteurs sont un élément essentiel de la réussite de notre club. L’ambiance dans les tribunes assure un spectacle unique en France et fait du public marseillais un douzième homme indispensable et le premier public de France. La passion, la ferveur et l’enthousiasme doivent permettre aux joueurs de puiser dans leurs ultimes ressources afin de se surpasser, et d’offrir des moments d’émotion inoubliables ».

Mais dans le même temps, il ne cesse de les brimer en infligeant lui-même des huis clos par anticipation aux éventuelles décisions de la commission de discipline, comme par exemple à la suite de l’incident du pétard lors du match face au LOSC ou plus récemment, sans doute par l’intermédiaire de son directeur de la sécurité, Thierry Aldebert, d’envoyer les CRS faire du maintien de l’ordre plutôt musclé (dirons-nous) sur le parvis du stade à la sortie d’un match.

L’an passé, suites aux sanctions lourdes de cette commission, il avait proposé des places à cinq Euros pour replacer les supporteurs en Ganay Haut, cette saison ces mêmes places étaient souvent à dix euros. Il ne cesse de compter sur eux, mais ne fait aucune concession sur rien et surtout ne monte jamais au créneau pour prendre leur défense. L’exemple du pétard en est la parfaite illustration. Qu’il condamne le geste, évidemment et tous les groupes l’ont fait, mais qu’il punisse lui-même tout un stade qui n’avait rien fait pour un seul imbécile sans même tenter de se défendre auprès des instances, c’est inaudible et inacceptable pour des supporteurs dont les valeurs sont justement la combativité et l’opiniâtreté.

Un jeu… sans jeu !

Dans l’aspect sportif, le jeu proposé par notre équipe est très difficile à analyser, non pas que nos connaissances en matière de football soient limitées, mais surtout parce que les bases d’une façon de jouer sont inexistantes. On pourra me rétorquer que la première année nous avons finis quatrièmes avec 77 points et avons disputé une finale de Ligue Europa (ce que j’avançais moi-même comme argument en début de saison), mais si on va vraiment dans l’analyse, même l’an passé, tout était dans l’envie, la réaction et la grinta. Ce qui n’est pas pour nous déplaire par ailleurs, mais quand on enlève l’envie et la grinta, il ne reste plus grand-chose et c’est ce qui s’est passé cette saison. Certains matches étaient d’un ennui digne d’endormir les plus insomniaques d’entre nous. Le nombre de fois où nos joueurs ont été dans la réaction voire l’inaction  avec un entraîneur qui ne faisait des changements qu’à la 77e minute !

Les matches contre Limassol ou Andrézieux étant les points d’orgue du vide abyssal de notre saison. A contrario, le match contre Nice de la saison passée a été la référence de la prise de conscience et de l’envie de cet effectif. C’est simple, j’ai réfléchi… réfléchi encore… j’ai tellement réfléchi que je m’en suis fait une fracture du neurone. Je n’ai pas trouvé un seul match référence cette saison. Un match où à la fin nous aurions pu nous dire : « On a gagné 3-0, mais on aurait du en marquer 16 ! ».

Mais concrètement, il est évident qu’il n’y avait aucune volonté technique de développer un style particulier. Ou alors ça m’a échappé. Je serais malhonnête si je ne disais pas qu’il y a eu par moment des actions de grande classe, à une touche de balle, rapides et vers l’avant, c’était, je pense, l’idée de départ de Rudi Garcia. Malheureusement cette saison, en n’alignant jamais les mêmes onze titulaires, il paraissait difficile de développer ce style de jeu. Et surtout pour que cela fonctionne, il faut beaucoup d’automatismes et une qualité d’entrainement physique importante et une confiance inébranlable.

À la décharge de Garcia (sans pour autant l’excuser), plusieurs faits se sont enchaînés. Tout d’abord la saison dernière a été très longue et malgré toute l’énergie déployée, elle s’est terminée sur une triple déception. Celle de perdre une finale de coupe d’Europe, celle de finir à la place du con malgré un total de points assez rarissime – cette saison avec 77 points nous finissions seconds derrière « l’indéboulognable » Paris Saint-Germain – et enfin celle de la blessure en finale de notre capitaine Dimitri Payet, le privant et de finale (puisque sorti prématurément) et de Coupe du monde. Il ne s’en remettra sans doute jamais et ce qui fait penser que certains joueurs ont sans doute surjoué en vue de l’événement mondial.

Un entraîneur qui a eu trop confiance dans les qualités mentales de son effectif et qui a fauté en s’offrant le luxe de préparer la saison depuis la Russie où il était présent pour commenter les matches de la coupe du monde. De l’aveu même de celui qui « niquait la science » la saison passée, Adil Rami a fait un burn-out cette saison préférant les plateaux télé pour faire le pitre que le rectangle vert pour faire le guerrier et le meneur d’hommes qu’il est normalement : « J’ai eu le burn-out. Oui je l’ai eu, exactement… J’en ai discuté, j’ai essayé de trouver des solutions. Je savais que je n’étais pas à 100% mentalement et physiquement. J’en ai parlé, j’ai même eu au téléphone un coach mental pour essayer de comprendre. Mais oui, c’était un burn-out ».

Le point commun des deux saisons restant l’incapacité chronique à ne jamais gagner contre un concurrent direct malgré un effectif composé de joueurs tels que : Mandanda, Rami, Rolando, Gustavo Sanson, Strootman, Payet, Thauvin ou encore Germain. Nous sommes tous d’accord pour dire que, selon l’expression consacrée, sur le papier, ça a de la gueule. Cet effectif-là, mené par un technicien digne de ce nom doit proposer autre chose de plus consistant aussi bien techniquement que tactiquement dirait notre sélectionneur.

Le tort de l’entraîneur n’étant plus à prouver en termes de jeu, car c’est tout de même lui qui en est le garant, le tort du président est colossal. Dès l’élimination actée en Europa League et à la suite d’un mois de décembre catastrophique, il aurait dû, sans aucun doute possible, profiter de la trêve et changer d’entraîneur. Malheureusement, le changer à ce moment là en l’ayant prolongé seulement deux mois avant, il se serait mis dans une position très compliquée vis-à-vis de l’actionnaire. Il a fait le pari de la stabilité, il a perdu… et nous aussi.

Des motifs d’espoirs ?

Même côté transferts, on pouvait se demander s’il y avait encore un capitaine aux commandes du gouvernail du navire Olympien. Venu de l’eau, ok, mais sans capitaine, c’est un boat people qui a accosté à la pointe rouge. Le cas symptomatique du fameux  « grantatakan » en est la parfaite illustration. On se posait tous la question : « Mais que fait Zubi ? Zeubi ! ».

Malgré une confiance largement « Eyraudée » en notre président, il a finalement acté la décision de limoger Rudi Garcia au soir d’une énième fessée contre Lyon et manifestement, compte tenu de la tournure des événements récents, il apparaît qu’enfin l’anticipation soit une donnée prise en considération par nos dirigeants.

On a enfin retrouvé un directeur sportif qui a retrouvé le sourire en choisissant le technicien avec lequel il allait (Hallelujah) pouvoir collaborer en la personne d’André Villas-Boas. Ce n’était pas forcément le choix premier des supporteurs, mais faisons contre mauvaise fortune bon cœur et surtout n’allons pas savonner la planche de celui qui a pour mission de nous faire atteindre des sommets.

Ainsi dès janvier, il a conclu une négociation qui n’avait que trop duré pour prendre enfin le contrôle du Vélodrome. Alors, certes, ça ne sera pas la même chose que d’être propriétaire du stade mais on s’en rapproche et nul doute que cela sera, normalement, une source un peu plus accrue de revenus pour le club.

De la même manière, OM Campus dont les infrastructures mises en place sont de grandes qualités semble être lancé sur de bons rails, même si tout est encore loin d’être parfait, mais on part de tellement loin. La volonté réelle d’accroître le scooting de néo-footballeurs et d’en assurer la formation pour les intégrer de plus en plus tôt à l’équipe première et plus généralement de développer la formation sont des bonnes choses et il était temps de construire des fondations à ce club pour lui permettre de se pérenniser. En récolter les fruits prendra du temps, mais il fallait le faire.

Le retour des féminines dans l’élite fait aussi partie des bonnes notes de la saison, à la condition que cette fois – mais @Olympiennes en parlerait cent fois mieux – on leur donne les moyens de leurs ambitions.

Enfin, le plus grand motif d’espoir à mes yeux est la façon dont a été recruté le nouvel entraîneur du club. Lorsqu’il a été présenté mercredi en conférence de presse et que nous avons pu constater que tout était quasi bouclé depuis quelques temps, on est en droit de penser qu’Andoni Zubizarreta a repris les rennes du sportif et c’est assez rassurant. Le basque, jusqu’ici muselé par un coach omnipotent, va pouvoir déployer ses réseaux. En espérant qu’il nous déniche quelques perles rares qui respirent enfin le football.

Nous sortons d’une saison décevante à tous points de vue et forcément notre « Marseillitude » nous incite à nous enflammer dans le bon comme dans le mauvais. Nous sommes comme ça, des « attachiants » et il faut nous prendre comme ça. Pour ma part, je suis prêt à accorder encore une année de crédit au chef d’orchestre à condition qu’il apprenne de ses erreurs, qu’ils défendent bec et ongles tous ses musiciens sur le devant de scène – quitte à leur mettre une en backstage – et qu’il ne cherche pas à réinventer des symphonies qui ont fait leur preuve ici et là. Qu’il s’en inspire, qu’il les copie même si ça peut le rassurer. Cette musique qu’est le football est plus que centenaire et elle est la plus populaire du monde, elle peut évoluer par petites doses et ne supporte pas l’à-peu-près.

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A propos de Tacle Glacé


Supporteur de l'OM depuis sa naissance et même avant j'étais un spermatozoïde engagé !
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