320cds a écrit:Merci de ce post éclairant.
J'aimerais avoir ton point de vue à l'occasion sur le thème ci dessous :
plusieurs médecins m'ont servi le discours suivant :certaines pathologies sont des gisements de médicaments "rentes / vaches à lait" (car à vie pour le patient). Eux étaient "scandalisés" par 2 points:
1) ils sont persuadés que des études / pistes pour cure définitive de la pathologie ont été sciemment "enterrées" par les labos. Ils m'ont sorti des exemples (je ne sais pas si c'était sérieux ou des colportages de légendes urbaines).
2) le lobbying / corruption pour faire abaisser le taux "X" qui est le jalon pour déclarer un patient "malade" de manière abusive ou exagérée, afin de "créer" d'un coup de baguette magique plusieurs milliers de nouveaux malades et donc clients. Avec des taux disparates selon les pays. Exemple (je ne me souviens plus de la pathologie, l'exemple est peut être mauvais) : en France avec un taux X, tu es déclaré diabétique et tu dois acheter ton insuline, en Pologne avec le même taux, tu n'es pas considéré comme diabétique.[/b][/b]
Je te demande ton avis car à mes yeux, tout ce qui sort de la bouche d'un médecin n'est pas forcément parole d'évangile,
il suffit de voir le nombre de médecins qui croient vraiment à l'homéopathie comme principe actif, autrement que comme excellent placebo.
Je connais ces critiques chez nos amis médecins, enfin une minorité (très audible) des médecins, qui souhaitent aujourd'hui se racheter une virginité post affaire Mediator, au détriment des laboratoires.
Pour répondre aux 2 points :
1) ils sont persuadés que des études / pistes pour cure définitive de la pathologie ont été sciemment "enterrées" par les labos. Ils m'ont sorti des exemples (je ne sais pas si c'était sérieux ou des colportages de légendes urbaines).Je pense que c'est un faux débat. En réalité, de nombreuses maladies autrefois mortelles ou invalidantes sont aujourd'hui devenues chroniques, du fait de l'émergence de nouveaux traitements efficaces.
A travers l'arsenal thérapeutique existant, le diabète, certaines maladies rares, voire des cancers, qui entraînaient un déclin extrêmement rapide du patient, voire son décès, sont devenues des maladies chroniques aujourd'hui, le patient ne se dégradant plus, ou du moins beaucoup plus lentement qu'auparavant.
Cela a permis à ces patients de conserver une activité quasi normale, un emploi, et de ne pas tomber immédiatement dans une spirale de dépendance/handicap.
Alors oui, ces traitements gèrent la chronicité, sans être curatifs. Mais ce n'est pas une "volonté" des laboratoires, mais tout simplement l'évolution naturelle de la science vers des médicaments biologiques par exemple.
Certaines de ces maladies sont liées à des déficits/carences. Exemple : un déficit d'une enzyme qui entraîne une dégradation musculaire ou des atteintes multi-systémiques d'un patient. Les traitements existants permettent de remplacer l'enzyme manquante mais doivent être pris à intervalle régulier, l'organisme ne produisant toujours pas de lui-même l'enzyme manquante.
La révolution de demain (dont on voit les prémices) c'est notamment la thérapie génique. Pour cette même maladie, aujourd'hui compensée par un traitement par enzymothérapie, on ne viendra plus remplacer l'enzyme déficiente mais directement agir au niveau du lysosome, donc de la "cellule" pour vulgariser, pour la modifier et faire une sorte de "reboot" du système, qui parviendra ensuite à produire l'enzyme. Un seul traitement pris une fois et le patient sera "normal".
Le modèle économique de notre système de santé est prévu pour financer les traitements chroniques. Que fera le système pour absorber le financement d'une thérapie génique, qui devra amortir le coût de R&D du traitement sur une seule prise ?
Devons-nous financer la boîte de médicament / la pillule, ou bien repenser notre système pour financer l'état de santé du patient et lisser le coût sur la durée ?
Exemple : ma thérapie génique coûte 100 et permet au patient de regagner une santé 100% normale. Aujourd'hui le traitement chronique coûte 50 par prise mais permet de maintenir le patient à 80% de son état de santé sur la durée. Il faudra à mon sens financer la thérapie génique à hauteur de 10, chaque année pendant 10 ans, tant que le patient conserve 100% de son état de santé normal. Le système fera une économie énorme, tout en permettant au laboratoire de rentabiliser son investissement et de faire du profit.
2) le lobbying / corruption pour faire abaisser le taux "X" qui est le jalon pour déclarer un patient "malade" de manière abusive ou exagérée, afin de "créer" d'un coup de baguette magique plusieurs milliers de nouveaux malades et donc clients. Avec des taux disparates selon les pays. Exemple (je ne me souviens plus de la pathologie, l'exemple est peut être mauvais) : en France avec un taux X, tu es déclaré diabétique et tu dois acheter ton insuline, en Pologne avec le même taux, tu n'es pas considéré comme diabétique.Je n'ai jamais entendu cette critique de la part d'un spécialiste. Je suppose que c'est une remarque de médecin généraliste ?
Les critères permettant de désigner une personne comme étant "malade" viennent des académiques, donc des médecins. Ces critères sont uniformes à un niveau international ou quasi uniformes.
C'est sur la base de cette littérature académiques (notamment) que l'agence européenne du médicament délivre les autorisations de mise sur le marché des médicaments. Une seule AMM vaut pour tous les pays européens : pologne, grèce, france etc.
Cette AMM donne l'indication (le périmètre thérapeutique) pour laquelle un médicament peut être utilisé. Exemple : diabète de type 2 ou parfois des niches thérapeutiques "diabète de type 2 pour les patients non répondeurs à tel autre traitement".
Enfin il y a un principe de liberté de prescription du médecin, qui est inscrit à l'Ordre et dans le code de la santé publique. Un médecin est seul juge de l'état de santé de son patient et du traitement à lui donner. Il n'y a aucune obligation à prescrire quoi que ce soit.
De la même manière, il n'y a aucune obligation pour un patient diabétique, par exemple, à se soigner. L'accès à la santé est un droit inaliénable des patients, mais en aucun cas un devoir pour eux. Si demain tu es malade et que tu ne veux pas acheter de traitement, qui va t'y obliger ?
Pour le lobbying, associé à la corruption, je ne ferai pas de commentaire particulier. Juste dire que la profession de lobbyiste est l'une des plus réglementée et contrôlée au monde. Sans oublier le propre contrôle interne effectué par biais d'audits réguliers.