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Dimitri Payet, le milieu de l'OM : « Quand je marque, je maigris »
Dimitri Payet, le milieu offensif de l'OM, ironise sur les critiques du début de saison concernant son poids, alors que l'international commence à redevenir décisif.
Dimitri Payet s'est habitué aux critiques, au fil d'une carrière non linéaire qui l'aura vu tutoyer les sommets et redescendre parfois assez bas. Après avoir porté l'OM jusqu'en Ligue des champions avant le premier confinement, le Réunionnais (33 ans) était dans le creux depuis le début de saison, finissant même par atterrir sur le banc. Un passage à vide que l'international (38 sélections, 8 buts) reconnaît aisément mais qu'il refuse d'expliquer par sa forme physique. Les sensations semblent revenir et le Marseillais, qui a prolongé cet été jusqu'en 2024, nous raconte ce passage à vide.
« L'OM est potentiellement premier de L 1 avec deux matches en retard (contre Lens, le 3 janvier, et contre Nice, date pas encore fixée). Évoquez-vous le titre entre joueurs ?
Non, ce n'est ni le moment ni l'objectif fixé. On est au mois de décembre, il reste une deuxième partie de saison à faire. On est bien placés pour savoir qu'en étant champions d'automne, on peut ne pas l'être à la fin (1).
Votre entraîneur, André Villas-Boas, glisse quelques allusions publiquement. Et en interne ?
Il dit que si ce n'est pas le PSG, ça sera quelqu'un d'autre, et si ça peut être nous, c'est bien. Mais aujourd'hui, dire qu'on est à la bataille avec Paris, non. En tout cas, cette année, le Championnat est serré. Je vois Lille très costaud aussi.
La Ligue des champions a été un fiasco, en revanche, avec trois points, cinq défaites, deux petits buts marqués, par vos soins, sur penalty.
Avec un nul d'entrée contre l'Olympiakos (0-1, le 21 octobre), on aurait déjà brisé cette série noire de défaites (13 d'affilée en C1 depuis 2012, record de la compétition). On aurait pu être plus sereins. Là, c'était emmerdant, d'autant que j'étais là aussi pour les six défaites d'affilée en 2013. Mais on n'a pas été au niveau, tout simplement. On n'a pas mis un seul but dans le jeu. Le bon côté, c'est qu'on est arrivés à basculer entre les matches de C1 et ceux du week-end (l'OM est sur une série de six victoires d'affilée en L1). Pour exister dans cette compétition, il faut de l'expérience. Un club comme l'OM doit jouer la Ligue des champions tous les ans. Depuis combien d'années on n'a pas participé deux fois de suite à la C1 (2) ? Il n'y a pas de secret.
Pour la Ligue des champions, le recrutement estival s'est révélé un peu tendre.
Ce n'est pas aux jeunes qu'on va le reprocher. Qu'on me tape sur les doigts, oui, mais eux, ils découvrent la compétition, on ne peut pas leur mettre ça sur les épaules. Il y a de la qualité et ils peuvent faire du bien au club dans les années qui viennent.
Il est si fort que ça, Luis Henrique ?
Moi j'adore. C'est un joueur très talentueux et un super mec. Il a des qualités que j'ai rarement vues.
Villas-Boas n'a pas hésité à vous sortir de l'équipe cette saison. Est-ce que cela a modifié vos rapports ?
C'est logique et il m'a même laissé longtemps titulaire, alors que je n'étais pas performant. Quand tu n'es pas bon, tu vas sur le banc, c'est comme ça. Même si ça m'a fait mal de ne pas commencer le premier match contre Manchester City à domicile (0-3, le 27 octobre). On s'est battus la saison dernière pour jouer ce genre de rencontre. Mais je ne pouvais pas lui en vouloir. Je n'avais pas le niveau.
Vous l'acceptez plus facilement qu'il y a quelques années ?
Oui et non. Mais là, je ne pouvais pas aller me plaindre au coach. Il m'aurait répondu : "T'es con, tu ne mets pas un pied devant l'autre". C'est à moi de travailler, d'être plus efficace, parfois sur des bouts de match. Sur un miracle à Strasbourg (1-0, le 6 novembre), je rentre (65e) et on marque un but (Sanson, 72e). La confiance revient comme ça, petit à petit.
Est-ce que votre entraîneur y met les formes vu votre statut ?
Je ne suis pas Dieu non plus. Il m'a prévenu que je n'allais pas commencer parfois. Ça me touche de ne pas jouer. Mais les places sont chères aujourd'hui. La saison dernière, il n'y avait pas de concurrence.
Faites-vous partie de ceux qui ont appelé Villas-Boas quand son avenir à l'OM était incertain en mai ?
Oui, bien sûr, j'ai fait partie des premiers qui l'ont appelé, comme tous les "anciens". Ce n'était pas anodin car cela nous a amenés à prendre parti dans un conflit qui concernait le club et le coach. Mais on ne pouvait pas commencer cette saison avec un autre coach que celui-là.
Quels sont vos rapports avec votre président Jacques-Henri Eyraud ? Vous faites partie de ceux pour lesquels il n'était plus trop le bienvenu dans le vestiaire en raison d'un désaccord sur les primes la saison dernière. Et les discussions sur les baisses de salaire ont été tendues pendant le premier confinement.
Ça, c'est ce que vous avez écrit. On ne peut pas être d'accord sur tout, il le sait. On a négocié des contrats avec le club. Mais on ne s'est jamais tiré dans les pattes. Pour ma prolongation cet été, on a trouvé un accord en même pas une semaine. Ce n'est pas une période évidente. Il y a ce Covid-19, un club en difficulté financière, notamment à cause de ça mais aussi pour des raisons plus anciennes. Certaines discussions n'ont pas été faciles. Chacun fait aujourd'hui la part des choses. On est très tranquilles avec le président, pas de soucis là-dessus.
Vous appréciez AVB, comme vous avez pu être proche aussi de Rudi Garcia à une époque. Vous êtes-vous réconcilié avec lui ?
Non. Avec moi, c'est noir ou blanc. Je préfère les gens qui sont francs, qui disent les choses, même quand je ne suis pas bon. On en parle, c'est plus simple que d'essayer de faire de la langue de bois ou de raconter des conneries. Aujourd'hui, ça fait partie du passé.
Cela va un peu mieux pour vous depuis la trêve de novembre. Était-ce essentiellement un problème physique ?
Il y a eu une préparation tronquée, des matches de suspension, le Covid qui a pu jouer aussi sur ma forme. Après, quand on est moins bien, la confiance en souffre aussi.
Le premier confinement vous a-t-il coupé les jambes ?
Ça a perturbé tout le monde. Quand on regarde les clubs français en Coupes d'Europe, on est un peu à la ramasse. Les autres ne se sont pas arrêtés, nous on a stoppé quatre mois. Il n'y a pas une équipe qui survole physiquement le Championnat, à part peut-être Lille.
Vous êtes-vous laissé aller pendant le premier confinement ?
Non, pas spécialement. J'ai cuisiné mais ce n'est pas pour autant que je me suis laissé aller.
Êtes-vous en surpoids ?
J'ai le même poids qu'il y a quelques semaines mais entre-temps j'ai marqué des buts (contre Nantes, 3-1, le 28 novembre, et l'Olympiakos, 2-1, le 1er décembre). Quand je marque, je maigris en fait (ironique). Il faut toujours trouver une raison quand je suis moins décisif. Mais moi, je sais qu'il n'y a pas de soucis à ce niveau-là. C'est sûr que j'avais moins de jus. Mais c'était aussi dans la tête. C'est comme ça que ça marche, il faut que je marque des buts et que je sois décisif. Et ça va revenir.
On sent quand même que cette trêve de novembre a fait du bien. En avez-vous profité pour changer quelque chose dans vos entraînements, votre nutrition ?
Ça irait dans mon sens de dire ça. J'ai été à Merano (ville italienne célèbre pour ses cures), j'ai pris un préparateur physique, j'ai fait un Ironman (triathlon extrême) (sourire)... Mais non, je n'ai rien changé. Il n'y a pas eu de révolution dans ma façon de m'entraîner et de vivre.
En début de saison, on a aussi beaucoup parlé de vous pour vos chambrages sur le PSG, notamment quand ils ont perdu la finale de la C1. Est-ce que vous regrettez ?
Pas du tout. J'aimerais même continuer. Ça fait partie du jeu, il ne faut pas le prendre au premier degré. Mais je me suis rendu compte d'une chose : ce n'est pas le PSG qui m'a répondu, même si Presnel (Kimpembe) l'a fait de bonne guerre en conférence de presse. Non, ma surprise, c'est qu'il y ait autant de supporters de Paris dans les médias. Après, quand on est chambreur comme moi, si tu es susceptible, t'es mal. Parfois, ça va un peu loin. Mais c'est parce que c'est l'OM, c'est moi. Je l'accepte. Je sais encaisser.
Quand vous avez joué le PSG (1-0, le 13 septembre), vous avez pu constater que les Parisiens n'avaient pas aimé.
Je me suis réveillé le lendemain avec des douleurs aux chevilles, oui. Je ne pensais pas qu'un tweet pouvait les faire dérailler comme ça. Tant mieux, ça nous a permis de prendre trois points là-bas. Ce jour-là, on a su rester dans le match.
On dirait que vous aimez être au centre de l'attention.
Je peux être exceptionnel sur une saison et si je me loupe la saison d'après, on ne va pas me faire de cadeaux. Ça montre que ceux qui me critiquent savent ce que je peux apporter. C'est un peu de l'amour contrarié (rire). Ça peut être motivant. Mais j'arrive à me mettre la pression seul. Quand l'équipe joue mal ou perd, je me dis que c'est de ma faute.
Vous êtes-vous habitué à ne jamais faire l'unanimité ?
C'est l'histoire de ma vie. Avec moi, il y a toujours un truc à dire, que je sois bon, pas bon, mince, gros. Mais c'est plus excitant qu'une carrière lisse. Ma femme me dit souvent : "Je ne sais pas comment tu fais pour supporter ça". Pour moi, c'est un jeu. Je ne me plains pas. Je lis, je regarde, j'écoute ce qui se dit sur moi et parfois même j'en rigole. Je ne peux pas répondre à tout le monde et de toute façon ça ne servirait à rien. C'est sur le terrain qu'il faut répondre. Regardez, en marquant trois buts, j'ai perdu 4 kilos...
Vous avez prolongé à l'OM jusqu'en 2024. Avez-vous vraiment baissé votre salaire ?
Vous mettez mon salaire de base tous les ans dans la presse (plus de 500 000 € brut mensuels). Vous divisez par deux la première année (celle en cours) et vous enlevez 30 % la seconde (la saison prochaine). J'avais une demande en contrepartie, c'est que je puisse continuer après ma carrière à avoir un rôle et une influence importante dans le club (dans l'optique un jour de devenir directeur sportif). J'en avais marre aussi, à chaque fin de saison, d'avoir des discussions avec la famille. Est-ce que je vais en Chine, en Arabie saoudite, au Qatar ? J'aurais pu y gagner plus d'argent mais ma femme avait déjà eu du mal à s'acclimater à l'Angleterre (à West Ham, club de Londres). Mes enfants grandissent et ils ont besoin de se fixer quelque part. Je voulais aussi une petite Marseillaise (sa fille est née le 20 novembre). On est bien ici.
Vos garçons, eux, sont à l'OM. Ils y joueront plus tard ?
Si je prends des fonctions dans le club, oui (rire). On verra, je ne leur mets aucune pression pour qu'ils en fassent leur métier. Même si moi, j'ai toujours rêvé de jouer avec mon frère.
À la fin de votre contrat, vous aurez 37 ans. Y a-t-il une possibilité que vous vous arrêtiez avant ?
Il y a une possibilité que je m'arrête après aussi. J'ai un contrat mais je n'ai pas de limites non plus. Regardez Hilton qui prolonge tous les ans. Ça va dépendre de ma forme. On verra bien. »
par gaby » 23 Nov 2020, 10:05 
